Andéols d’automne
Les grands domaines qui mêlent divinement art-gastronomie-vin-hôtellerie sont-ils particuliers à la Provence? Je ne saurais vous répondre mais je commence à avoir un petit répertoire de destinations hédonistes à vous recommander. 23° ce week-end dans le Lubéron. Loin du soleil brûlant de l’été et des foules estivales, c’est la merveilleuse saison pour découvrir ces paradis provençaux sous influence aux beaux jours. Je vous ai récemment parlé du Château de la Gaude avec ses 17 chambres, son chef affranchi et son jardin magnifique. Le Domaine de Fontenille est aussi une belle parenthèse. On ne cite plus le Château la Coste qu’il faut visiter comme un musée. Poussez donc un peu la route jusqu’en plein coeur du Lubéron. Du coté de St Saturnin-lès-Apt, en juin, les lavandes colorent les paysages. En automne, la couleur est à l’ocre: celle des sentiers du Roussillon comme ces jaunes orangés des vignes au repos. Gordes n’est à quelques kilomètres, Apt et ses fruits confits itou. On roule au milieu des oliviers et l’on débouche soudain sur le Domaine des Andéols. Incroyable hôtel établi entre lavandes, jardins, bassins, maisons nature, oeuvres d’art et oliveraies. Les Andéols étaient un village jusqu’à ce que le propriétaire des lieux – un Mr mode – décide de racheter pour n’en faire qu’un. De sorte que les 17 chambres se répartissent entre bungalows isolés dans les champs, suites nature et maisons individuelles. Tous sont meublés différemment en art contemporain signé. On passerait là des jours à écouter les grenouilles, se prélasser dans le jacuzzi en plein air ou fare niente au bord d’une piscine à débordements chauffée. A cette saison, la cueillette des olives sur les 996 arbres du jardin commence. En janvier, l’huile 2019 sortira du moulin de St Saturnin. Les deux restaurants du domaine n’emploient qu’elle!
Le 7éme Elément, ouvert uniquement le soir, opte pour une cuisine gastro travaillée par une équipe resserrée, dirigée par Julien Bontus, passé notamment chez Marc de Passorio à l’Esprit de la Violette. Celui-ci revendique une pratique nutri-préventive : des produits issus au maximum de la ferme de Grange-basse, annexe agricole du Domaine, pâtisseries au seul sucre non raffiné, du beurre végétal maison à base d’huile d’olive, etc. Dans les faits, ça siphonne pas mal pour alléger les textures. Comme cette « béarnaise light » servie en salle par Julien, à grands renforts de « c’est plus léger, travaillé différemment avec moins de beurre« très convaincants. Jusqu’au dessert, on manque pas d’air. Tarte tatin toute aérienne et poire chocolat qui passe toute seule. Comme ce Revelette rouge, ton sur ton avec le mur de Castelbajac derrière.On regrette juste un peu cette sphérification désuète en amuse bouche autour de l’huile d’olive. Rien ne saurait remplacer une bonne trempette pain/fleur de sel dans ce gras ultra sain, très local et bien ardent…
Le midi, on peut encore déjeuner dehors, sous un arbre majestueux, situé en contrebas du domaine. J’ai rarement vu feuillu aussi impressionnant. Le style culinaire ne prétend pas l’être. Mais dans son genre bistrot de cocottes, il excelle. Maurice Alexis, arrivé il y a quelques mois, a eu tout l’été pour se rôder aux envois rapides et efficaces. Même pas peur: le chef a traversé pas mal de ministères, les cuisines de l’Elysée et même celles du président gabonais à vie, Ali Bongo. A la tête d’une brigade de 40 personnes, il envoyait quotidiennement quelque 500 couverts! On déjeune, ici pour un peu moins de 50€, une soupe de potiron bien veloutée, une parfaite poulette aux petits légumes pleins de champignons frais, une joue de boeuf fondante et, qui ne l’est pas mois, un gâteau au chocolat servi en bocal.
Toute l’équipe des Andéols, qui n’a pas soufflé depuis le printemps, prendra ses quartiers d’hiver dans un mois. Encore quelques semaines donc pour profiter en toute tranquillité du soleil déclinant dans ce site majestueux planqué à 1h de Marseille, 45 mn d’Avignon, 3h de Paris. Sinon, rendez-vous pour la St Valentin. N’oubliez pas …