Mère Poulard contre Père Troisgros : battle d’omelette
Chez la Mère Poulard, « on n’a pas écrit la légende, on la vend ». Voire on la survend. Under cover au Mont St Michel, je vous ai raconté la disneyisation de l’omelette de la Mère Poulard. Reste que histoire de l’entretenir, on ne vous lâche pas les secrets qui font la légende. D’ailleurs, « le secret, c’est qu’ il n’y a pas de secret », coupe court Eric Hego, le DG du groupe. Et c’est pas loin d’être vrai. Comme je suis tombée dans l’omelette Troisgros il y a tout juste une semaine, j’ai de fortes présomptions sur la Poulard’s touch. Sans info au château, reste un palais…
Préparation : je dirai une dose de maïzena plutôt que la farine chez Toisgros, un fouettage intense des œufs entiers (alors que jaunes et blancs montés séparément à Roanne) jusqu’à obtention d’une structure très mousseuse, assez épaisse. Poêle en fonte comme chez Troisgros, mais celle du Mont St Michel qui a un manche immense pour pouvoir la manipuler dans la cheminée.
Cuisson : au feu de bois en Normandie, parce qu’on est dans la légende, contre four élécetrique dans la Loire, parce qu’on est moderne. La particularité de la Mère Poulard réside dans cette cuisson au feu de bois. Sur flamme et non sur braises. Donc bûches neuves régulièrement. On y pose la poêle hyper beurrée au préalable. Quand le petit bain de graisse bouillonne gentiment, on coule une bonne dose de mousse d’œuf. Jusqu’à ras du bord et on pose sur bûche, 4 à 5 mn. Le mélange gonfle à ce moment là jusqu’à légèrement dépasser le bord de la poêle. L’omelettier pose alors celle ci sur le coté de l’âtre où elle continue à cuire doucement, puis la remet une fois, encore sur du repos, et enfin une dernière où il vient lécher le dessus de l’omelette avec les flemmes pour la faire dorer et croustiller. Dans le fond de la poêle, les œufs cuisent de façon classique, sur une moitié de la hauteur. Au dessus par contre, c’est à peine cuit et l’on fait en sorte de garder énormément de mousse non cuite, tiédie par le feu.
Service : tandis que Michel Troisgros empile 2 omelettes l’une sur l’autre, celle de La Mère Poulard est pliée en 2. D’un sérieux coup de main («l’omelette c’est un doigté, un geste», dit Michel Troisgros), on la plie aux trois quarts dans l’assiette, laissant ainsi déborder une bonne dose de mousse. Finir par une noix de beurre sur le dessus.
Dégustation : au Mont St Michel, aucun effet de baveux ni de coulant crée sciemment chez Troisgros par le fromage et le mode de cuisson. Ici, l’effet soufflé prime sur le reste. La dégustation alterne donc entre des morceaux juste cuits et une mousse quasi crue. Comme on est ici à 38€, on sert une omelette à 5 œufs par personne quand Troisgros préconise 6 œufs pour 4.
Avis : dans les 2 cas, ces omelettes s’avèrent extra ordinaires, au sens propre. Celle de Troisgros a l’avantage d’être reproductible, celle de Poulard moins puisqu’on n’a ni la recette ni la cheminée. Perso, je ne suis pas fan du coté mousseux cru. Mais loin des critiques qui traversent la baie, ce plat iconique de ce rocher emblématique est plutôt bonne. Par contre, je en suis jamais allée chez Troisgros. Il me reste donc à programmer 3 allers-retours à Roanne pour me rattraper de la mère sur le père!