L’adresse du gourmet solitaire
Il faut prendre sous le bras ses Rêveries d’un Gourmet solitaire et partir déjeuner seul au Petit Keller. Il se passe alors dans le nouveau restau de Kaori Endo (partie de Nanashi il y a 3 mois) comme un syndrome schizophrénique. On lit l’histoire de ce japonais aussi esseulé que nous, on commande le même maquereau miso, un peu plus de riz , comme lui, et l’on s’en va de cet isakaya parisien en faisant de satisfaits « gouc », « pfou », « croc », « gnom ».
A trois dans une minuscule cuisine, l’équipe de Kaori sort une belle carte de tapas nippons. Finies les graines de Nanashi, Kaori revient aux sources, avec des souvenirs d’une mère, « très bonne cuisinière ». De minis mimi entrées, moitié françaises (saucisse sèche d’Emmanuel Chavassieux), moitié Kaori. Comme cet oeuf mollet délicieux, encore coulant, cuit au miso servi avec des feuilles de roquette moutarde. On zappe les saladiers apportés sur table comme à la maison pour passer direct aux plats: 3 Donburi (saumon, maquereau ou basse cote) ou 3 plats tendance veggy.
Puisqu’on arrive juste au moment où le Gourmet en commande un à Shibuya « bon jusqu’aux arrêtes », ce sera le donburi maquereau sauce miso. Joli morceau de poisson grillé avec les petits condiments de rigueur, des radis roses girly et des graines de sésame. Le riz de Camargue est un poil cuit, il faut croire que la réaction camarguaise à la cuisson n’est pas la même que la japonaise. Mais on se régale, bol dans une main, livre de l’autre. Au dessert, gourmandise retrouvée: les premières gariguettes, tartelettes avec un biscuit au matcha, tarte aux pommes ou un gourmand baba au whisky spécial gourmets.
Au contraire du Gourmet, je suis buveuse et l’assume. Dans un Souci de préservation planétaire, le Petit Keller ne propose pas de sake mais des vins natures bien choisis. Pas d’Espoir de bulles le midi, mais un tète Red des Tètes qui coule tout seul (ou pinot blanc de Fleith, Cheverny de Philippe Teissier en blancs), et met juste en joie le mangeur solitaire.