Mais où es-tu Camdeborde?
Avant, Camdeborde, c’était bien. On débarquait là à n’importe quelle heure, quasi sûr de ne pas avoir de table. C’était la foire d’empoigne sous les chaufferettes. On enviait les élus tapant dans la terrine. Et puis on faisait les yeux doux à la serveuse, on lui criait famine, notre désir de cette cuisine vivante et canaille, et elle finissait par nous lâcher: « la 3 est au café. Revenez dans 15 mn« . Alors on filait à l’Avant Comptoir, la salle d’attente du relais et en se faufilant jusqu’au dit comptoir, on arrivait à se mettre dans le bec un verre et une rillette et on patientait gaiement parce que le Comptoir du relais nous attendait. Et puis Cambeborde a cédé les soirs de semaine aux démons du gastro: 30 couverts à 60€, c’est plus rentable que 60 à 30€. Parce que moins de boulot : tout le monde aux St Jacques et à la mousseline (de panais). Pour peu que certains cèdent au lièvre à la royale à +25€, c’est bingo! Alors on vous cale là entre deux anglais, trois américains, deux boucles d’oreille en perle et une robe noire. On vous chuchote le menu à l’oreille et vous colle la carte des vins avec un sandwich maison: une double tuile à l’andouille forte et grailleuse. Et là, malgré la sinistrose des serveurs et les murmures de la salle, on se dit que Cambedorde a gardé sa vigueur. « Tu vas voir, c’est une excellente maison, roborative mais élégante« , disais-je à ma copine. Je glisse au sous sol me laver les mains et en reviens circonspecte: en cuisine, je n’ai aperçu que 3 cuistots dont un japonais – ahhh!!!! – un ado – ah!??? – et point de Cambe’. Après tout, la formule unique c’est aussi ça: l’économie de moyens. Mais pas celle de créativité! Encore moins de l’enthousiasme. Le menu ronronne autant que cette salle qui esquisse des sourires touristiques. Tout est convention. Une gentille poitrine de veau pour pousser quelques cèpes à l’huile de noisette. Un mousseux yuzu sur les 3 St Jacques. Un veau qui trop cuit, perd le charme de sa provenance: Desnoyer. Le midi, Grébaut l’avait servi saignant (comme j’aime ces répétitions de tables qui forgent le goût de la critique). L’espace n’est pas prévu pour y glisser l’immense plateau de fromages (bons!) trop gastro pour la table bistrot. Tristement, on a collé des étiquettes « vaches, chèvre » pour s’y retrouver au milieu des Escadut et autres Lou Cap Bourrut qui auraient pu raconter une belle histoire. Dessert incohérent qui mêle mousse, glace à l’eau (trop) et gâteau russe. A 23h, tout est plié. Extérieur, intérieur. Tandis que le tout jeune apprenti refait surface blouson au bras, la dernière table de Brit’s a l’air de s’installer en douce ébriété. Tu vois, avant, c’était comme ça Camdeborde: ca se bousculait, on s’entendait pas, ça rigolait, ca se charriait entre serveur et dîneurs. Ca faisait du bien au corps et à l’âme. Là, c’est chiant! Je lui avais promis un restau remonte moral à ma bretonne. J’ai foiré!
Le Comptoir
01 44 27 07 97 | sur réservation du lun au ven, « le week end faut patienter » . On vous prévient au téléphone que le Comptoir est plein plusieurs mois à l’avance. J’ai eu une table à midi pour le soir…