couscous partout, grève nulle part
En 2010 (un des mes 1ers papiers sur ce blog), le repas gastronomique des Français, devenait patrimoine culturel immatériel de l’humanité à l’Unesco. Aujourd’hui, le Maghreb rêve d’obtenir la reconnaissance des Nations Unies qui porteraient mieux que jamais leur nom. En effet, Mauritanie, Maroc, Algérie et Tunisie ont enfin trouvé un terrain d’entente pour déposer, en mars dernier, une demande commune. La table réunissant les frères ennemis? C’est que « le couscous unit autant qu’il divise« , apprend-on dans ce documentaire de F3, signé Cécile Favier, diffusé le 9 décembre prochain. Effectivement, si douze recettes officielles existent, chaque famille revendique la sienne comme la meilleure. Un plat « féminin et berbère » dont les racines remontent à la nuit des temps. Cécile Favier a tracé jusqu’aux vestiges archéologiques algériens pour savoir qui le premier a planté la petite graine. « Difficile de savoir à quand remontent ses origines« , explique Edouard de Laubrie, responsable du pôle alimentaire et agriculture au Mucem de Marseille, « les premières mentions sont faites en Algérie au 10è siècle, puis on le retrouve au Maroc, Tolède et le Portugal« . La France, qui le place aujourd’hui parmi ses 5 plats préférés, entre raclette et moules frites, s’en délecte depuis le 19è siècle. Le Reboul, célèbre bible de cuisine provençale, mentionne une recette simpliste dès sa première édition de 1897. Le blé reste au centre de notre histoire avec l’Algérie et le Maghreb: le paiement d’une créance de livraison de céréale est à l’origine de la présence française en Algérie. Et au siècle suivant, l’arrivée massive de populations maghrébines dans les années soixante, explique la production française industrielle de semoule dès les années 70.
Car non, l’arbre à couscous n’existe pas. On apprend dans ces 52mn comment se fabrique la graine mais surtout, comment ce plat perpétue les cultures, historiens et anthropologues à la clé. Gardiennes de ce patrimoine culinaire, les femmes en ont fait leur « sacrifice » (dixit Ouiza Galleze, anthropologue), élevées dès leurs premières années en vue d’être capables de s’asseoir de très longues et pénibles heures pour le préparer. Alors s’il n’y a pas d’événement sans couscous en Algérie, il est aussi de bons espoirs d’une « graine de réconciliation massive« . Une sénégalaise a remporté le couscoussier d’or au Championnat international de couscous de Sicile cette année, l’anthropologue Slimane Hachi, espère fortement que ce plat transnational devienne celui « qui unifie les populations« , un met d’union d’une civilisation maghrébine métissée, qui pourrait inaugurer « d’autres convergences, d’autres unifications« .
D’ici là, je vous recommande chaudement d’aller en ce vendredi, rendre visite aux deux soeurs du Jasmin de Tunis, qui font un des meilleurs couscous tunisiens de Marseille.
Couscous Zizanie sera présenté en avant-première samedi aux Grandes Tables de la Fraiche à 19h, suivi d’un couscous en vrai au profit de l’asso Femmes d’ici et d’ailleurs.
Diffusion France3 PACA, le 9/12 à 23h puis en replay.