Refugee Food Festival, acte3
Marseille accueille cette semaine le Refugee Food Festival. Le principe de cet événement, crée il y a 4 ans et qui touche quelque 14 villes dans le monde (en France) est d’ouvrir les cuisines d’un restau à un chef étranger réfugié en France pour des menus issus de ces rencontres culturelles. « La cuisine universelle, a ce formidable pouvoir de reconnecter les gens« , édicte Louis Martin le co fondateur de cet événement.le tissu associatif marseillais ne manque pas de ressources en la matière. En 2016, les Allemands de Kitchen On the run avaient déjà donné un bon aperçu des besoins locaux. Cette année, le Café Borely se met à la cuisine afghane toute la semaine, vendredi, l’Epicerie Idéal s’ouvre à la Cote d’ivoire et jeudi, l’Arrosoir aux mets soudanais. Chacun joue à sa façon avec ces allers-retours qui vident à enrichir chaque culture gastronomique régionale. Au café Borely Mamadhil Ashakullah voulait un plat à la courge. A défaut de saison, Thierry Casoni lui a proposé une courgette de Nice. A Yima, Tina Demeke Eneyew a cuisiné une sauce rouge bien relevée. Ella Aflalo l’a mise sur une galette. « Drôle de rencontre », s’est étonnée Tina qui ne l’a jamais présentée ainsi. Ainsi va le jeu de la world food. Le plus abouti des menus est sans doute celui du Môle Passedat qui hérite de la star du RFF. Mohammad Elkhaldy, c’est le conte de fée de l’intégration réussie. Arrivé en France en 2015 après un périple à travers plusieurs pays du Moyen-orient et européens, avec une solide expérience en Syrie (18 franchises, conseiller pour plus de 200 restaus, star TV), Mohammad a déjà travaillé dans les cuisines de Jégo, Troisgros et autres Grébaut. Son zahtar n’est fait qu’avec les épices de Roellinger… Le garçon participe à Taste of Paris et organise des buffets pour Kenzo et Hidalgo. En toute logique, le voilà donc chez Passedat.Sébastien Dugast a l’intelligence de lui laisser carte blanche: son menu, ses produits, ses plats. Sauf que lui les réinterprétera à la française, avec ses équivalents et habitudes locaux. Sardine, pois chiches, langoustine (le courant marin est le même entre Marseille et la Syrie), mérou, etc. Ainsi le friquet (blé vert) syrien devient un boulghour méditerranéen, le pois chiche à humous se transforme en pois chiche à soca, d’un dessert à base de fleur d’oranger va naitre un calisson. Chaque assiette sera double.
Marseille, évident terrain de mixité sociale et mondiale, s’avère particulièrement active dans les initiatives culinaires citoyennes. Partisan du « brassage des formes d’alimentation et les projets culinaires solidaires« , le Fonds Epicurien est cette année partenaire du festival. Et le RFF, intelligemment médiatisé, met du coup à jour un certain nombre d’acteurs culinaires dans ce domaine universel – des Mixeaty, les Apprentis d’Auteuil, des Etoiles et des femmes, la table de Cana, Cuistots Migrateurs sont autant d’organismes travaillant à la question de la cuisine comme vecteur culturel. Une notion qui est l’essence même de sofoodsogood.