La Mercerie : Marseille décousu!
Qui aurait eu à Marseille les bollocks d’aller fourrer son restau entre une armurerie, une place de parking illicite et l’arrêt de tram qui dessert les HLM du 12è, le tout à la porte d’entrée du ventre de Marseille que n’ose pas franchir la bourgeoisie marseillaise??? Personne si ça n’est une bande de jeunes slashers de la restauration, à l’accent anglo américain qui ne boit que des vins qui sentent la nature. Marseille attend, mi extatique mi depuis des mois l’arrivée du Paris PopUp. La Mercerie ouvre demain et la ville a le sentiment de basculer. Mazzia avait, en 2014, mis le pied dedans, Harry, Laura & Julia ouvrent désormais le champ des possibles . « C’est bien, il en faut« , murmurent ceux qui n’auraient jamais voulu y aller à Noailles. Se coltiner une population qui représente la moitié de la ville mais assurément, ne mange pas tout à fait comme nous, lutter avec les camionnettes qui inlassablement ont fait d’une place piétonne leur parking, arriver avec un nouvel accent, connu du sud pour le seul rouge, blanc et noir de Manchester. Marseille enfin prête à accepter l’étranger?
Poussez la grande porte vitrée de cet ancien magasin de boutons et vous êtes instantanément ailleurs. Immense comptoir en bois séparant la salle en parallèle et la cuisine toute ouverte couverte de carreaux bleu céladon (déco signée Fragos + Lecouturier architectes, la team qui a opéré le Yam’Tcha2). Au bar ou en salle, dans tous les cas, on mangera face à Harry Cummins et son équipe de barbus. Un menu délibérément choisi à petits prix (21.26€ le midi. menu unique à 39€ le soir) qui dessine une cuisine personnelle – le chef Harry voulait enfin poser ses couteaux et ses cuillères pour exprimer toute sa personnalité. L’outil est fait pour lui: un grand Big Green Egg et des fourneaux flambants neufs. « Une cuisine créative et changeante. L’offre est humble mais l’effort sera dans la transformation des produits« , assure Laura Vidal. Pour l’ouverture, 4 petites entrées avec notamment l’houmous de Harry, avec son zatar à lui, et qui deviendra sans doute un incontournable du quartier. Pita et pain maison : sans doute encore un peu de travail de ce côté là mais le four est en place. Vous mettrez ensuite votre palais en interrogation sur un étonnant japonais chawanmushi dashi, un flan japonais aussi soyeux qu’un kaki, qui donne envie de gober comme un flamby. Puis 2 plats, 2 desserts et beaucoup de travail. De petits condiments, des cuissons justes, du légume croquant, du cochon qui a du goût, des oeufs très frais d’un producteur local soigneux. Coté vins, que des « altrovino ». Il faut entièrement faire confiance à Laura qui a baroudé dans toutes les vignes du monde de sorte à avoir des allocations de folie, et, pour les intimes, une cave perso dans laquelle on a tapé Une herbe Folle de Lilian Bauchet – folie beaujoloise d’un vigneron surNaturel qui assume ses vins « qui ne goûtent jamais pareil, qui peuvent avoir des parfums exceptionnels, qui peuvent être mal lunés ». Encore une fois, l’intelligence de l’équipe a percuté: une carte qui s’étale de 18 à 300€ avec des verres à 4 ou 5€ ! Enfin des gens qui ont compris comment faire boire. L’adresse est vive, jeune, enjouée, différente. La Mercerie signe assurément une nouvelle envie ici. On adhère entièrement, non conscients de vivre cette ville autrement. Jouir de ses chemins de liberté. Un coup d’oeil à travers la vitre : à l’intérieur, c’est le nouveau Marseille. Dehors, c’est Marseille.