Il arrive du n°4 des 50 Best au Pérou, est passé chez Gagnaire, Grébaut, Wahid (qui a succédé à JF Piège à Thoumieux), a traversé l’Asie, s’est arrêté chez Ben Shewry, l’australien multi awardisé, et le voilà dans le 11è,  juste devant nous. Derrière une grande cuisine ouverte, les yeux plongés sur les sorties d’assiettes, la voix chuchotée sur son équipe, l’oeil discret sur sa salle. Simon Horwitz a été annoncé comme le messie de fin d’année, ouvrant discrètement juste avant Noël. Avec un CV pareil, on se dit qu’il y a un nouveau génie à Paris. Un éléphant dans les tables parisiennes! Elmer est beau, coloré, designé, frais, aéré. De grandes tables d’hôtes en beau bois installée en plein milieu face cuisine donnent envie de transformer le gastro en grand banquet de potos. Derrière, alignées contre les murs, des tables plus intimes. Une bonne soixantaine de couverts + un très grand bar: ambitieux de nos jours où la gastronomie rencontre la crise. Pas moins de monde en salle. Il en faut: chaque assiette est intimement travaillée, dans ses assaisonnements, ses ajustements, son visuel.

Harengs fumés/poire de terre aux algues/faisselle et radis (12€) alors que l’huître/concombre de mer/laitue de mer du voisin est magnifique (12€). Pour les plats, la rôtisserie carbure pour des bêtes à plume d’exception – volaille Cou Nu (26€), canette de Challans (23€). Les légumes bizarres sont de sortie: ortie, laitue de mer, crosnes (pas cuits!), salsifis, patate douce. On les retrouve des entrées aux desserts  : orange/patate douce/banane/caramel demi sel (pas mal, simple mais gourmand, 12€) ou une pomme/oseille/calvados très peu convaincante où chaque élément semble posé là sans dialogue, sans gourmandise et l’oseille n’est que dans l’addition. Les bouteilles, choisies par Sébastien Perrot (ex maison de l’Aubrac, les Rouquins, l’Ogre) donnent envie: superbe Pineau d’Aunis en magnum au verre, et sinon bon choix de natures (Les Foulards Rouges, Souhaut, Jousset, Guillot, etc).
L’esthétique générale est travaillée, le rythme moins. On regarde cette rôtissoire qui devrait avancer comme une trottinette face au piéton, on observe cette impressionnante brigade debout, joliment tatouée, qui devrait envoyer plus vite que 2 chefs assis mais on il y a un mois, un service long, trop long. Gageons qu’ Elmer ait pris depuis sa vitesse parisienne. Peut être trop de minutie dans les détails alors qu’on voudrait une révolution d’ensemble. Avec ce CV éléphantesque, on s’attend pas à une table alerte comme une gazelle, un Elmer aussi léger que bigarré, un pachyderne qui renverse tout.