Le pistou c’est maintenant et pas plus tard. Il vous reste encore quelques semaines pour foncer Chez Vincent qui cuisine certainement le meilleur pistou de la ville. Même pour une personne, une grosse soupière est posée sur la table et on se sert à la louche comme on veut de cette soupe méditeranéenne servie pour Pantagruel. Dans cette adresse légendaire du quartier de l’Opéra, sous titrée « le Vésuve », coincée rue Glandeves (déjà tout un programme) entre l’excellent boucher de la Feuille d’Argent et un bar à putes, où Gaudin a ses habitudes, la quasi centenaire Mme Rose veille encore sur son restau à la déco de faïences désuette. Réfugiée désormais près du four à bois, elle surveille comme elle l’a toujours fait, si les pizzas sortent comme il faut, bien fines et un peu grillées. Le pistou est ici légende. Toute la semaine, des afficionados s’envoient des marmites de cette soupe réalisée dans toutes les règles de l’art uniquement d’août à octobre. Ici, on est extrêmement sérieux sur la question: trois haricots (c’est encore la pleine saison), une pointe de cèleri, de la pomme de terre, de l’ail (mais pas trop), des grosses nouilles, une juste dose de pistou et parmesan à part. Pas question de laisser une goutte dans le récipient: les tables qui n’ont pas commandé vous en voudraient. Celles qui ont succombé, soupirent d’aise une fois leurs multi assiettes terminées. Vue la dose, le pistou Chez Vincent est un plat unique. Zappez les hors d’oeuvre de Rose. Et inutile d’espérer avaler le moindre flan maison caramel cuit au feu de bois, même si vous aviez fait la promesse, avant d’attaquer le pistou, de vous y coller au dessert à ce gros pavé flageolant fermement dans la vitrine.