La Grenouillère, c’est comme le Bonheur est dans l’assiette (qui lui était consacré hier), il faut se le faire en play et replay. Un restau carpaccio: à volonté! Branchez votre GPS sur Madeleine sous Montreuil (attention, pas La madeleine tout court…J’en connais qui ont fini dans une pizzéria de Lille!) et filez. Au printemps sous les pommiers, à l’automne dans les feuilles, en hiver dans le froid, mangez Alexandre Gauthier à n’importe quelle saison. Dans les chambres conçues par l’architecte Bouchain, tout est pensé sexe & food. Cuir, bois, cordes, cages et l’on tombe amoureux! « Passer dans le 21è siècle juste en prenant un virage esthétique« . On arrive à table en pleine extase. En ce moment, où l’on ne quitterait son lit que pour des choses douillettes, c’est l’idéal. On entre doucement dans les légumes d’hiver mais on garde encore la fraicheur de ceux d’été. Des coques entières mijotent à point dans un petit pain. Le client se fait artisan, mange avec les doigts, coupe des ficelles, lèche l’assiette. Gauthier adore, moi aussi! Lui qui bannit les iphones, veut faire de nous le client des cavernes. Sous les chaines, il flambe le homard au genièvre, fourre des grenailles sous des croûtes de poivre, cox ring les asperges de cébettes. « C’est rustique, l’ostentatoire n’a pas de place ici« . Le service ne laisse pas respirer. La cuisine envoie en glissant neuf à douze plats qui bombardent en tous sens. Viande, poisson, légume, sucre qui revient sur le sel. Le chef a fait des bulles comme un verrier pour y glisser un sorbet de menthes sauvages du jardin d’à côté. Il a les clés,mais nous ouvre sa porte. Aucun hasard. Tout a été cogité pour que le palais s’en souvienne. C’est comme une bonne caresse: rien n’est de trop. Gauthier a la pulsion d’un Araki. Il nous tient, nous lie et nous lâche tout à la fin, quand il faut quitter la table pour passer à la prochaine photo. Abandonnés dans une salle vide, les mains sur le cuir, dehors l’appel des grenouilles. On est un peu bousculés mais rassérénés par ces claques culinaires. Et demain? Il y a le replay.