Gluten tag
C’est le grand jour. Celui de la victoire. Gluten tag à tous. Voilà ce que prônent de plus en plus de chefs. Un jour sans gluten. En ce match avec ou sans, ils ont arbitré pour une cuisine libre, où l’on ne ferait pas son blé sur le dos des autres et où l’on marquerait des buts à éliminer toute fraction protéique insoluble du grain. Ach, scheize me suis-je dit en entendant Arnaud Carton de Grammont me balancer: je vais essayer de faire une cuisine sans gluten! Mince, le chef marseillais du Café des Epices n’a rien khmer vert, on le dirait plutôt… jouissif et auteur d’une cuisine épicurienne. Et puis, bang, hors jeu, remplaçant, voilà qu’un autre régional de l’étape rentre sur le terrain des Sans Glu; Armand Arnal, rejoint l’équipe des « with love allergen free« .
Ah bon la cuisine peut être good sans gluten??? Moi qui serait plutôt pour – le sucre, le beurre, le vin, l’alcool, le… – le « sans » m’ennuie. Sans Badoit, on ne pétille plus de joie! Face à la table, je donne dans le Fernand Point: Du beurre! Donnez moi du beurre! Toujours du beurre. Devant les interdictions alimentaires, je suis un peu comme Benzema face à Neuer: ennervée. Intriguée par cette nouvelle pratique qui s’étend délibérément aux cuisiniers de plaisir, j’ai donc voulu pourquoi ces deux bons vivants se mettent à cuisiner « sans ». La première de leur réponse a été : je me régale! Ach….
Pas question ici donc de s’embarquer sur le chemin vertueux du no glu et la question des intolérants qui ne le sont souvent pas qu’au gluten. Car, à lire encore le Times, pour 93% des mortels le gluten n’est pas un problème! Passé les questions sanitaires, reste la seule notion du goût qui préoccupe essentiellement ce blog. Et là Armand et Arnaud de font qu’un. Si le premier va plus loin dans une recherche de cohérence avec un lieu qui « prône un raisonnement locavore« , le second se contente des vertus du sans gluten : « plus léger, moins lourd sur l’estomac, plus digeste, croquant en bouche« . Côté Chassagnette, Armand a déjà bien avancé la question: « mon travail sur l’acidité et l’amertume a fait que je n’arrivais plus gustativement à avoir un pain qui accompagnait mes plats« . Le chef du Café des Epices a sorti une première jolie tartelette aux tomates confites 0 gluten : 500g de farine de maÏs + 500g de farine de riz, 500g de beurre, 4 œufs, sel, poivre. La pâte est fine et croustillante avec la sensation texturante de polenta non cuite. « Je trouve que le liant est intéressant et la pâte aussi : meilleur au goût que celle de blé, plus subtile et agréable en bouche« . Plus difficile à travailler aussi (très fragile, la pâte s’effrite), à manipuler, à cuire le sans gluten oblige à de nouvelles recherches culinaires. Plutôt motivant du coup pour un cuistot.
A la Chassagnette, les recherches sont beaucoup plus avancées. Armand Arnal a travaillé plusieurs mois avec Nadia Sammut qui prône un glutenfree plein d’amour. La cuisine d’Armand est désormais 100% gluten free. Du pain jusqu’aux cookies, c’est no glu. La Chassagnette meule ses propres farines, notamment de riz rouge et de pois chiches camarguais. « Celles-ci développent certaines saveurs« , explique Armand Arnal, « sur le cookie – un it maison! ndlr – « on arrive beaucoup mieux à dissocier les saveurs de noisettes, noix, noix de pécan, fleur de sel« . La colle recherchée dans le gluten est trouvée ailleurs : dans les graines de lin (« trempées elles se gélifient »), des gélifiants naturels comme le blanc d’œuf, etc.
« C’est une révolution en cuisine« , reconnaissent ces néo no glu, « une méthode de travail différente » mais aussi « une cuisine pour tous et gustativement, globalement beaucoup mieux« . Pour Arnaud Carton de Grammont, motivé par une épouse libre de gluten (et pas que), « si je peux avoir une cuisine no glu, ca sera un vrai message aux gens un peu frigides et qui ricanent sur le sujet, comme toi« . Hi hi…..