La cuisine fait-elle jouir?
J’étais hier soir tranquille à mon article pour le prochain Fricote, quand soudain déboule Alain Passard! Le chef de l’Arpège s’est introduit chez moi sans prévenir. Voix suave, histoire bien ficelée. Un restaurant, un cheval, un jus de betterave et hop, on vous emballe la poulette en deux chansons. Passard a une tonalité radiophonique ultra travaillée, surtout quand il est face à la gente féminine. Et là, Barbara Carlotti envoie du lourd. Hier soir, Alain était donc l’invité de Barbara et la Planète Gourmande a quasi viré porn food. La belle, la traitresse, avait dîné bien sûr. Le beau lui contait les délices de sa cuisine légumière. « Donnez nous envie« , lui murmure-t-elle! « Le plaisir de retrouver le produit« , lui sussure-t-il, « les navets, le poireaux, les premiers panais, salsifis, raifort« ! La respiration ralentit, le ventre se cabre, la musique c’est celle d’un sauna échangiste… « En ce moment, le chataîgner est à côté des navets, le poirier a laissé tomber ses poires, le rutabaga …. » Oh, ouiiiiiii, Alain, encorrrrrre. Autant vous dire que j’ai laissé tomber Fricote, l’oreille collée dans la bouche de Passard:
Elle : « mais…vous le faites d’une certaine manière….« . WTF?????? Ah, oui le jardin bien sûr.
Lui : « Ce qui est important c’est cette notion de rendez-vous. Vous n’avez pas touché à une tomate depuis un an« . Mange des tomates mon amour, tchik thcik thik (ndlr).
On était là devant le poste comme devant l’Empire des sens: le témoin qui mouille, fantasme, imagine, sans pouvoir être de la partie. Heureusement, Gesaffelstein nous a ramené dans une techno sombre et menaçante et j’ai alors fait place aux questions culinarolingus-philosophiques. A savoir qu’à l’heure où la Fiac ouvre ses portes, la question de l’art-cuisine est totalement obsolète et sans intérêt. Le vrai sens de la cuisine c’est: fait-elle jouir? « Notre rôle c’est d’offrir du bonheur« , me racontait l’après-midi même Michel Bras. Tout en élégance. La plupart des chefs parlent de plaisir! La branlette culinaire est autorisée même dans les meilleures maisons. Confiée à de bonnes mains gastronomiques et critiques. Je la pratique d’ailleurs avec célérité. Eve a croqué la pomme et nous a bien mis dans la merde. Maintenant on adore ça manger! Ca nous remplit le palais, ça énnerve nos sens, ça astique l’intime. Les chefs connaissent le point C, voilà, c’est tout. Les 1ers rendez-vous se jouent autour de leurs plats, les contrats les plus juteux se signent autour des meilleures tables, les bouches se découvrent dans les restaurants, les corps se livrent au long de leurs menus. Devant les chefs, les « épiculriens » se pament. A table, quand c’est bon, quand c’est bien, là où les hommes ont au mieux dit oui, les femmes, elles, ont joui! A la fin de ces lignes, j’ai reçu un mail avec le sommaire de Thuriès Magazine; ca calme! Edito d’Yves Thuriès sur le repos dominical. Dominique nique nique …